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La lutte contre le handicap récompensée au concours Lépine

La lutte contre le handicap récompensée au concours Lépine
Le 11 mai dernier, le professeur Robert Duchamp (Ai.163) a été récompensé doublement lors du prestigieux concours Lépine pour son kit Mainpulse. Ce système de propulsion pour fauteuils roulants manuels, installable facilement sur près de 80% des modèles existants, procure une aide majeure à nombre de personnes en situation de handicap.
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Par Christophe Duprez
Publié le 2025-05-16
L’idée de ce kit a germé dans la tête de l’inventeur en discutant avec son épouse. Kinésithérapeute en pédiatrie, elle travaillait en effet avec des enfants éprouvant des difficultés à mouvoir leur fauteuil. Le professeur Duchamp décide ainsi de mettre au point un système apte à faciliter la mobilité et l'autonomie d’utilisateurs sujets à des douleurs aux épaules, des problèmes de préhension de la main courante (située en arrière et hors de leur champ visuel), ou n'ayant pas assez de force pour mettre leur fauteuil en mouvement.
Un système 3 en 1
Le kit Mainpulse est constitué de trois parties : une roue arrière, un volant placé en position supérieure pour être accessible à la main, et un système de transmission et d’entraînement reliant l’une à l’autre via un châssis mécano-soudé en V. Il s’installe facilement en quelques minutes à l'aide d'une interface située sur le châssis qui se fixe à la place des deux grandes roues originelles.
En avançant le système de propulsion des fauteuils qu’elle met ainsi littéralement à portée de main, cette installation préserve les épaules et facilite l'accès au mode de propulsion grâce à deux volants ergonomiques directement situés sous les accoudoirs et dans leur champ visuel. Elle propose aussi un système de démultiplication de vitesse adaptant le rapport de transmission à leurs capacités physiques et au poids du fauteuil. La propulsion s’effectue par simple pression de la paume de la main ou du poing sur les volants. Enfin, dans une optique d’hygiène, tout contact avec la roue arrière est évité.
Cette invention apporte ainsi non seulement une réelle amélioration à l’ensemble des utilisateurs, mais aussi une réponse technique à des patients jusqu’à présent sans solution. Elle permet par exemple à des usagers devant nécessairement jusqu’à présent faire appel à un aidant, de mouvoir désormais leur siège en toute autonomie, ou encore à des enfants et des personnes âgées de bénéficier des gains musculaires générés par un modèle manuel.
Un modèle vertueux
Une autre originalité du kit réside dans son détournement de matériels et accessoires existants adaptés à ce type de mobilité. Ainsi, les volants proviennent de voitures de rallye et les roues arrière sont actionnées au moyen de courroies de transmission habituellement installées sur des chaînes de production industrielle.
Enfin, la production des pièces dans l’Hexagone et l’exécution du montage dans le milieu de l'insertion de personnes fragiles sont privilégiés autant que possible.
 
3 questions au professeur Robert Duchamp (Ai.163)
En quoi consistent les prix que vous venez d’obtenir ?

Le kit a remporté deux médailles d’or : la première au concours Lépine général et la seconde décernée par la Faculté de médecine et d’encouragement du sport, qui faisait également partie du jury.

Quels sont les prochains développements ?

Après l’obtention d’un brevet national il y a une dizaine d’années, nous venons d’en décrocher un européen. Via la start-up Rollinnove, nous testons actuellement plusieurs prototypes avec des ergothérapeutes dans des organismes spécialisés, en particulier des Ehpad, avec des retours très positifs. La participation au concours Lépine avait comme objectif de rechercher des partenaires en vue d’industrialiser et commercialiser le kit tout en assurant le service après-vente. L’un des problèmes majeurs que rencontre actuellement le monde médical réside en effet dans le manque de suivi après l’achat des produits.

En tant que professeur, vous faites participer vos étudiants à ce projet. Comment ?

J’enseigne effectivement en tant que professeur d’université émérite à l’Ecole nationale supérieure d’arts et métiers (Ensam) où j’ai créé et dirigé pendant plusieurs années le LCPI, Laboratoire de conception de produits et innovation. Aussi m’a-t-il semblé intéressant d’impliquer, au fil des ans, plusieurs de mes étudiants dans la simplification du kit, pour qu’il y ait une quantité minimale de pièces à fixer et qu’elles s’avèrent faciles à fabriquer et assembler. Ils sont d’autant plus motivés qu’il s’agit d’un projet industriel porteur de sens qui leur permet de découvrir un monde de l'économie sociale et solidaire qu’ils connaissent souvent très peu. Ils collaborent ainsi avec des spécialistes de la santé (ergothérapeutes, orthoprothésistes, kinésithérapeutes, psychomotriciens, gériatres, traumatologues, neurologues…), du médico-social (Ehpad...), des usagers parfois lourdement handicapés verbalisant difficilement leurs besoins, ou encore des salariés chargés de l'insertion par le travail. Un enseignement à la fois technique et humain !

Christophe Duprez