800 dirigeants sondés sur l’IA
Le cabinet Expleo a mené une étude en collaboration avec Ipsos intitulée « Intégrer l’IA : aborder la prochaine vague de transformation des entreprises ». Cette enquête a permis de recueillir les témoignages de 803 dirigeants européens pour comprendre l’intégration de l’intelligence artificielle à l’échelle de leur secteur et de leur entreprise, ainsi qu’au niveau des produits et services qu’ils entendent mettre sur le marché.
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Par Eric Roubert
Publié le 2024-11-27
À l’heure où l’IA est en passe de devenir la technologie déterminante de notre génération, son intégration rapide dans toutes les strates des entreprises européennes sera un point déterminant de compétitivité pour le continent.
L’enquête menée par Ipsos pour Expleo avait pour objectif de recueillir les témoignages de dirigeants européens pour comprendre l’intégration de l’IA à l’échelle de leur secteur et de leur entreprise, ainsi qu’au niveau des produits et services qu’ils entendent mettre sur le marché.
« L'intelligence artificielle est déjà une réalité, et non un concept futuriste. Toutefois, l'enthousiasme qui entoure cette technologie doit être équilibré par une exécution réussie. Après des années de promesses, les entreprises sont désormais à un tournant où elles exigent des résultats tangibles et un retour sur investissement. Pour transformer l'IA d'une simple preuve de concept à une intégration à grande échelle, il est essentiel de dépasser les seules capacités techniques. Un changement organisationnel profond est nécessaire pour l’intégrer de manière efficace et durable », explique en préambule Rajesh Krishnamurthy, PDG d'Expleo.
L’un des enseignements majeurs de cette étude est qu’il existe une réelle dissonance entre la perception d’une très forte intégration de l’IA dans son secteur d’activité et la réalité de cette intégration à l’échelle de son entreprise. Un effet « mirage » que les entreprises tentent de compenser en mobilisant leurs efforts, tous secteurs confondus, pour s’approprier cette technologie transformative.
QUELQUES CHIFFRES
Pour 47 % des dirigeants français interrogés, la transformation de leur industrie est bien en cours. Ils sont aussi 36 % à penser que l’IA a déjà commencé à impacter leur propre secteur d’activité. Seuls 23 % reconnaissent que l’IA a déjà transformé leur entreprise. Et 34 % considèrent que la résistance des salariés sera le frein majeur à l’intégration de l’IA au sein de leur organisation.
Les entreprises françaises ont-elles les moyens d’accélérer cette intégration ? Cette dernière est conditionnée par l’utilisation et le déploiement d’outils qui exigent une très grande agilité. Or celle-ci est déjà un défi pour un grand nombre d’entreprises, et elle n’est pas toujours au rendez-vous, selon les secteurs d’activité.
« Logiquement, les besoins et les attentes ne sont pas les mêmes, qu’il s’agisse des secteurs aéronautique, spatial, de la production manufacturière, de la distribution ou de la banque. Les entreprises de services bancaires et financiers – déjà hautement digitalisées et où la data, carburant de l’IA, est abondante – sont les plus avancées dans le déploiement de l’IA en interne, suivies par celles des secteurs des sciences de la vie, de l’énergie ou des transports, analysent les auteurs de l’étude. Au-delà des gains de productivité, 51 % des dirigeants français pensent pouvoir améliorer leurs services et leurs produits avec l’IA, et 39 % la considèrent comme indispensable dans le développement de nouveaux produits ou services. Cet optimisme mérite toutefois d’être nuancé. Pour intégrer l’intelligence artificielle à leurs propres process et produits, ou à la culture de leur entreprise, les interviewés expliquent qu’il est nécessaire de lever des obstacles techniques comme l’intégration de l’IA aux systèmes IT actuels, ou les freins financiers associés aux coûts inévitables de son déploiement. »
L’IA DANS LA MIRE
Parmi les décideurs interrogés, 80 % considèrent que l’IA peut transformer leur entreprise. Ils estiment, aussi et surtout, que cette technologie stimule la rentabilité en dopant la productivité, l’efficacité et la qualité des process. Plus encore, ces mêmes décideurs parient sur une accélération de la mise sur le marché de nouveaux produits et services.
Pour eux, la capacité de l’IA à améliorer le time-to-market (91 % des interviewés l’indiquent) et à accroître significativement la qualité des produits mis sur le marché (90 % des interviewés le mentionnent) justifie des investissements importants. Raison pour laquelle son financement demeure une priorité pour la quasi-totalité des entreprises interrogées : 89 % investissent déjà dans des outils d’IA.
Cependant, les entreprises sont toutes très attentives au retour sur investissement (ROI) – à court terme –, qu’il s’agisse de gains de productivité, de réduction de coûts ou de croissance du chiffre d’affaires.
80 % DES « PROJETS IA » N’ABOUTISSENT PAS
Donnée essentielle pour envisager l’intégration de l’IA sans tabou, le taux d’échec des projets portés par l’IA reste encore très élevé. En effet, 80 % des « projets IA » n’aboutissent pas. Ce chiffre colossal, et qui pourrait être inquiétant, n’entache cependant pas la confiance en cette technologie pour la majorité des dirigeants interrogés : 91 % d’entre eux pensent que les bénéfices retirés de l’intégration de l’IA dans leur entreprise sont plus importants que les risques.
Malgré les indéniables apports de l’IA, les décideurs sont confrontés à un défi majeur : sa mise à l’échelle pour être rentable. Réussir la transition du stade de projet pilote à celui de la production impose de surmonter de nombreux écueils, les plus urgents étant les intégrations techniques et la maîtrise des coûts. Ce constat se vérifie puisque 47 % des entreprises françaises jugent pertinent le recours à l’IA sur les activités de test et de contrôle qualité ; 54 % de ces mêmes entreprises le plébiscitent pour un usage très concret, dans le cadre, par exemple, d’opérations de maintenance prédictive, de l’optimisation de la chaîne d’approvisionnement, de l’amélioration de l’expérience client ou encore de la détection de fraudes.
FORMER À L’IA
Pour 34 % des dirigeants français interrogés, la résistance des salariés sera le frein majeur à l’intégration de l’IA dans leur entreprise. Mais, de façon surprenante, 84 % sont très confiants à l’idée que l’IA parvienne à générer plus d’engagement de la part des collaborateurs.
Résultat, au-delà de la mise en place de formations internes, 60 % des dirigeants des entreprises citées dans cette étude ont, d’ores et déjà, recours à des consultants externes pour adapter leur process à l’IA et contrebalancer d’éventuels manques d’expertise dans le domaine.
Faire appel à des talents externes doit pallier la crainte principale des dirigeants français : la réticence de leurs employés à l’usage de l’IA. Cette méfiance, cependant, n’est pas toujours justifiée, et le manque de connaissances sur le sujet est la principale raison de cette crainte.
Le plus dur reste donc à faire : accompagner les collaborateurs dans l’utilisation de cette technologie et des multiples outils qui y sont associés pour permettre une intégration optimale. Il faudra également veiller à les épauler pour que les gains d’efficacité espérés se concrétisent.
La formation, l’anticipation des freins humains et l’écoute des collaborateurs restent les principales réponses à leur apporter pour surmonter réticences et résistances internes. L’intégration de l’IA ne se fera pas contre les salariés, elle se fera avec eux, et pour eux. Faire comprendre avec tact et pédagogie les gains prodigieux en temps et en efficacité que cette technologie apporte, et ce, au bénéfice de tous, c’est tout l’enjeu de l’intégration de l’IA en entreprise !
Éric Roubert
Perception de l’impact transformationnel de l’IA par secteur en fonction du niveau d’adoption des outils d’IA
SOURCE : EXPLEO
Les entreprises sont toutes très attentives au retour sur investissement (ROI) – à court terme –, qu’il s’agisse de gains de productivité, de réduction de coûts ou de croissance du chiffre d’affaires.
SOURCE : EXPLEO
La majorité des dirigeants interrogés (91 %) pensent que les bénéfices retirés de l’intégration de l’IA dans leur entreprise sont plus importants que les risques.
SOURCE : EXPLEO