PolyFlix
prêt à révolutionner les opérations de parachèvement
Constituant l’étape finale de la fabrication des pièces industrielles, les opérations de parachèvement ont longtemps été le parent pauvre des investissements d’automatisation. En corollaire, la pénibilité des tâches dans ces ateliers détourne un nombre croissant de techniciens, et les difficultés de recrutement s’aggravent. C’est pour répondre à cette problématique qu’est née PolyFlix. Issue du campus Arts et Métiers de Metz et soutenue par AMValor, la start-up développe une solution d’automatisation à la fois performante et respectueuse de la place des opérateurs.
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Par La rédaction
Publié le 2024-09-08
Après une carrière dans l’industrie qui l’a conduit à des postes de direction, Étienne Callais est désormais le président de PolyFlix. En travaillant depuis vingt ans avec les équipes du campus de Metz sur différents projets d’innovation industrielle en rapport avec la transformation des métaux, il a noué des liens très forts avec l’École nationale des arts et métiers (Ensam) et AMValor : « Pendant huit ans, j’ai même débauché à temps partiel Régis Bigot (Li. 189), professeur des universités aux Arts et Métiers de Metz pour venir travailler avec moi. »
C’est de cette collaboration étroite qu’est né le projet PolyFlix. « Nous avons conduit tant de projets que nous avons pris l’habitude de rêver ensemble. » Et quand les ingénieurs se mettent à rêver, on passe vite de l’imagination au projet.
Incubé sur le campus de Metz, le projet PolyFlix a bénéficié du soutien de la Région Grand Est et de Bpifrance. Il devrait être prochainement labellisé « Deeptech ».
LIBÉRER LES OPÉRATEURS DU PIRE ET LEUR CONFIER LE MEILLEUR
« Notre cahier des charges de départ visait à supprimer la pénibilité des tâches, tout en laissant la main à l’opérateur », énonce Étienne Callais. L’outil, facile d’accès sur une simple tablette tactile, permet une visualisation en réalité augmentée de la pièce. L’opérateur conserve la valeur ajoutée de son travail puisque c’est lui qui repère les défauts éventuels. En revanche, il n’a plus à réaliser manuellement les finitions : il sélectionne les zones de la pièce à traiter sur la tablette et pilote les opérations de parachèvement qui sont automatisées. « Nous conservons ce qui fait l’intelligence du travail : la compréhension et le diagnostic de la pièce, résume le président de PolyFlix. Mais c’en est fini des semaines entières de meulage manuel dans la poussière, générant troubles musculosquelettiques et maladies respiratoires. »
La solution proposée par PolyFlix répond également aux enjeux de traçabilité. Peu de données étaient jusqu’alors récupérées au cours des opérations manuelles de fin de production. Avec l’outil numérique, il sera désormais possible de faire remonter aux services amont l’intégralité des informations nécessaires pour établir une cartographie des défauts. Étienne Callais insiste sur ce facteur de performance : « Notre système permettra de créer des nouvelles boucles de rétroaction et d’améliorer significativement l’ensemble du process. »
AMVALOR, ACTIONNAIRE DE POLYFLIX
Dans le cadre de sa mission d’opérateur d’innovation pour les Arts et Métiers, AMValor a choisi d’investir dans le projet PolyFlix. La filiale de l’Ensam détient un quart du capital de la start-up créée en début d’année 2024.
Stéphane Desmaison, directeur général d’AMValor, est particulièrement enthousiaste :
« Accompagner l’innovation est un axe stratégique de l’Ensam. Le projet PolyFlix coche véritablement toutes les cases répondant à cet objectif : c’est un vrai spin-off issu d’un de nos laboratoires et fondé sur une propriété intellectuelle commune ainsi que sur un brevet dont l’Ensam est co-inventeur. Deux enseignants-chercheurs du LCFC [Laboratoire de conception fabrication commande] sont parties prenantes de l’entreprise et détiennent des parts dans la start-up. Enfin, c’est un projet technologique industriel, nous sommes vraiment dans l’ADN Arts et Métiers. Si nous ne l’avions pas soutenu, nous serions passés à côté de notre mission. »
Pour Étienne Callais, la prise de participation d’AMValor a une importance stratégique : « J’ai tellement eu l’habitude de travailler avec AMValor que son entrée au capital représente plus qu’un apport financier. C’est un marqueur de confiance mutuelle ainsi qu’un apport de compétences, car je sais qu’ici il y a de la matière grise mobilisable. C’est aussi le symbole de la mobilisation de tout l’écosystème Arts et Métiers. Depuis les chercheurs du LCFC jusqu’à la direction générale de la recherche du groupe, en passant par la direction du campus de Metz, tous les acteurs et décideurs ont apporté leur soutien au projet. »
UNE ÉQUIPE D’EXCEPTION POUR UN PROJET À IMPACT
Rompu à l’analyse des business plans et à l’accompagnement des start-up, le directeur d’AMValor pointe les atouts de PolyFlix. « Beaucoup de projets s’appuient sur de belles innovations technologiques. Malheureusement, ceux qui les portent sont souvent le point faible, confie Stéphane Desmaison. Ici, au contraire, c’est l’atout majeur. L’expérience d’Étienne dans le management d’entreprise industrielle a été décisive pour notre engagement. Avec lui, Régis Bigot et Cyrille Baudouin [les deux chercheurs du LCFC directement impliqués dans le projet], nous sommes face à des personnes extrêmement compétentes et crédibles. »
L’impact sociétal du projet qui vise la réduction des troubles musculosquelettiques et de la pénibilité pour les opérateurs a également pesé dans la décision d’AMValor. « Dans nos prises de participation, nous privilégions toujours les projets à impact positif, sur l’environnement mais aussi sur la santé », rappelle Stéphane Desmaison.
UN « CADEAU » POUR LES INDUSTRIELS
L’étude de marché conduite à l’été 2023 a largement confirmé l’intuition des porteurs du projet. Étienne Callais s’amuse encore de certains des retours. Il cite un des industriels interrogés : « Cette solution, c’est ce qui me manque depuis des années. C’est comme si j’avais envoyé une lettre au Père Noël et que je recevais mon cadeau. »
« Le marché potentiel a été parfaitement cerné, et nous sommes convaincus par les perspectives commerciales. Sur ce projet, tous les voyants sont au vert », conclut Stéphane Desmaison.
Pour aller encore plus loin dans le calibrage des solutions qui seront mises sur le marché d’ici à quelques mois, la start-up a réuni un consortium d’entreprises tests dans des secteurs cibles tels que la fonderie, la forge et la mécano-soudure. « Cela va permettre d’accélérer le développement du produit final, en créant un process d’itération rapide entre nos solutions et leur mise en situation au sein de lignes de production réelles », explique Étienne Callais.
LE CREDO DE L’INNOVATION
« D’ici à dix-huit mois, nous aurons des briques technologiques à proposer au marché, mais nous ne nous arrêterons pas là, promet l’entrepreneur. Le credo de PolyFlix, c’est la R&D et l’amélioration continue. Les recettes que nous ferons rentrer avec ce premier produit nous serviront à investir dans d’autres projets. »
Pour lui, l’innovation est un impératif national. « On invoque toujours la nécessité de réindustrialiser la France, mais ça ne marchera pas si l’on industrialise comme il y a quarante ans, souligne Étienne Callais. Il faut sortir des cadres que l’on a connus et inventer de nouveaux modèles. », Le visage de ce passionné d’innovation industrielle s’éclaire d’un large sourire : « Et croyez-moi, des idées, on n’en manque pas ! » Nul doute que, pour PolyFlix, ce n’est que le début d’une belle et longue aventure.
La rédaction
crédit photos : DR