Industrie / Politique industrielle
"Mon ambition pour la Région Auvergne-Rhône-Alpes"

"Mon ambition pour la Région Auvergne-Rhône-Alpes"
Laurent Wauquiez, Président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, revient, à l’occasion du salon Global Industrie, sur ses ambitions pour la région en faveur des industries et sa vision à dix ans pour son territoire. Pour l'heure, en un an près de 200 projets ont été accompagnés représentant plus de 5000 emplois. 
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Par Propos recueillis par Eric Roubert
Publié le 2023-06-30
 
AMMag : En décembre 2021, la Région Auvergne-Rhône-Alpes adoptait son Plan de relocalisation stratégique. Doté d’1,2 milliard d’euros, celui-ci avait posé un objectif ambitieux : ramener, en 6 ans, 30 000 emplois industriels en Auvergne-Rhône-Alpes. Où en sommes-nous aujourd'hui ?
Laurent Wauquiez : L’objectif est toujours le même et les premiers résultats sont là avec en un an près de 200 projets identifiés et accompagnés par les services de la Région représentant plus de 5000 emplois. Le travail se poursuit et avec la crise énergétique nous devons redoubler d’efforts pour aider à nos entreprises tout d’abord à maintenir leur activité puis à mettre sur pied de nouveaux projets de relocalisation. L’ambition reste la même : faire d’Auvergne-Rhône-Alpes un territoire pionnier de la réindustrialisation.
AMMag : A l’heure où la crise énergétique nous rappelle l’importance des approvisionnements et l’urgence de repenser notre stratégie en la matière, comment la Région se positionne pour demeurer attractive ? Notamment sur la filière hydrogène ?
Laurent Wauquiez : Effectivement cette crise nous conduit à accélérer la décarbonation de notre territoire qui est l’un des grands défis des décennies à venir. Nous avons de nombreux atouts en la matière puisque nous sommes non seulement la première région industrielle mais aussi la première région en production d’énergie décarbonée grâce au nucléaire et à l’hydraulique. Dès l’émergence de la crise, nous avons mis en place un dispositif d’aides pour que nos entreprises puissent installer des systèmes de solarisation et diversifier leurs sources d’approvisionnement. Par ailleurs, nous sommes en pointe sur l’hydrogène en France mais aussi sur le plan européen. Dès 2018, nous avons pris un risque en investissant massivement afin de structurer une filière autour de nos chercheurs et de nos entreprises. Grâce au travail réalisé, nous sommes aujourd’hui en mesure de travailler sur des projets concrets permettant d’alimenter nos industries en énergie grâce à l’hydrogène. Je pense notamment au pipe H2 qui reliera le barrage hydraulique de Pierre-Bénite aux usines de la Vallée de Chimie près de Lyon.
AMMag : Alors qu’il est de plus en plus difficile de recruter dans l’ensemble des filières industrielles, quelles mesures mettez-vous en place pour soutenir la formation notamment sur les métiers industriels en tension ?
Laurent Wauquiez : La première chose, et c’est une solution à nombre de nos problèmes, c’est de remettre la valeur travail au centre de la société. Il n’est pas normal que nous ayons un taux de chômage de plus de 7% et que tant de secteurs ne parviennent pas à recruter. C’est pour cela qu’à la Région nous avons mis en place un plan de retour au travail favorisant les formations débouchant sur de vrais métiers qui recrutent dont ceux de l’industrie. Ensuite, il faut que nous parvenions à convaincre nos jeunes que le secteur industriel est une voie d’avenir pleine d’opportunités. C’est une démarche globale, plus nous parviendrons à relocaliser, plus nous aurons de beaux exemples de réussite à mettre en avant, plus les métiers de l’industrie redeviendront attractifs.
AMMag : Concernant, la formation des ingénieurs, la France manque d'ingénieurs. Comment la première région industrielle de France y répond ?
Laurent Wauquiez : Nous formons déjà 15% des ingénieurs au niveau national. Notre ambition est d’aller encore plus loin en faisant d’Auvergne-Rhône-Alpes la grande région de formation des ingénieurs, des techniciens et des scientifiques. Cela implique de cibler les secteurs d’avenir tels que le numérique comme nous l’avons fait en créant le Campus Région du Numérique à Charbonnières-les-Bains. Nous assumons dans notre région de privilégier les formations scientifiques et techniques plutôt que de financer des stages parking sans réels débouchés. On nous l’a souvent reproché mais je ne dévierai pas. Derrière, ce sujet de la formation c’est la compétitivité de nos entreprises, la qualité de nos savoir-faire, et in fine, la souveraineté industrielle de notre pays qui sont en jeu.
AMMag : Comment projetez-vous l’industrie sur votre territoire, dans les 10 prochaines années ? 
Laurent Wauquiez : Tout d’abord, c’est une industrie connectée et digitalisée puisque dans bien des domaines, je pense par exemple à la production textile, ce n’est que par l’innovation que nous parviendrons à être compétitifs par rapport à des concurrents étrangers disposant de normes sociales incommensurablement plus souples que les nôtres. Ensuite, c’est une industrie décarbonée puisque l’on voit bien avec la crise actuelle que l’avenir de nos entreprises ne peut s’inscrire à long terme dans l’approvisionnement en énergies fossiles. Enfin, c’est une industrie puissante et diversifiée qui aura réussi à relocaliser un maximum de productions sur notre sol. Il en va de notre souveraineté mais aussi de la protection de l’environnement puisque la principale cause d’émissions de CO2 réside dans nos importations. C’est un immense défi qui est devant nous mais nous pouvons y arriver. Il n’y a pas de fatalité. Mon ambition est que dans 10 ans nous ayons réussi à faire d’Auvergne-Rhône-Alpes, le modèle à suivre en France et en Europe en matière de relocalisation, d’innovation et de souveraineté industrielle.