Métiers / Conseils
Diminuer ses coûts pour une croissance durable

Diminuer ses coûts pour une croissance durable
Avec des coûts augmentant plus rapidement que les revenus, les entreprises sont contraintes de chercher des moyens pour réduire les dépenses. Les stratégies et méthodes de résilience, devenues essentielles depuis la pandémie de Covid-19, permettent de faire face à ce contexte incertain et d’obtenir un avantage concurrentiel opérationnel.
____________________
Par Frédéric Midy (Li. 181), président du cabinet de conseil Futurey
Publié le 2024-01-22
Depuis quelques mois, les prix de production ont fortement augmenté dans certains secteurs, non seulement sous l’effet des tensions sur les marchés des matières premières et des perturbations de la fabrication de certains composants, mais également en raison des différents contextes géopolitiques. En moyenne, les entreprises « mid cap » ont dû faire face à des augmentations des coûts sur 24 mois de 15,5 % par an (12 mois passés et 12 mois à venir). Malgré des hausses de prix dans 90 % des cas, un impact de –25 % sur l’EBITDA est constaté sur le passé et redouté pour l’avenir.
Au cœur de toute stratégie visant à faire face à l'augmentation des coûts se trouve désormais un élément essentiel : la résilience. Cette notion est devenue la nouvelle source d'avantage concurrentiel, prenant le pas sur les modèles d'entreprise rigides du passé. L’important est d’être agile et flexible. Cela peut se traduire par la capacité à réagir rapidement face aux nouvelles opportunités qui se présentent, ou par la résilience devant des chocs inattendus.  La pandémie de Covid-19 a été un révélateur majeur de l'importance de la résilience, avec des écarts significatifs de performance entre les entreprises. Certaines n'ont jamais retrouvé leurs niveaux d'avant le choc, tandis que d'autres ont réussi à se rétablir temporairement mais ont finalement perdu leur avantage. D’autres encore ont consolidé leurs positions et renforcé leurs avantages concurrentiels. À titre d’exemple, les équipes commerciales, chargées de générer des revenus et de maintenir la rentabilité, jouent un rôle essentiel dans cette démarche résiliente. En période de hausse des coûts de production, elles doivent être capables d'adapter les prix, de négocier des contrats avantageux, sur mesure, et d'identifier de nouvelles opportunités commerciales pour compenser ces augmentations. Au contact direct des clients, elles sont en mesure de recueillir des informations précieuses sur les besoins et les préférences conjoncturelles du marché. L’analyse de ces données facilite l'ajustement des stratégies commerciales et les prises de décision éclairées pour maintenir la compétitivité de l’entreprise. S’appuyer sur ses clients clés est en effet vital. Ce n’est pas une surprise, mais cette démarche est souvent oubliée.Les coûts indirects : un point de départ importantLe préalable essentiel recouvre cependant un enjeu majeur de leadership, car la résilience est un « mindset », un état d’esprit qui consiste, pour l’entreprise, à s’appuyer sur les crises ou les difficultés considérées comme des opportunités et non comme des risques. Facile à dire, plus compliqué dans les faits. Le CEO/COO(1) a donc un rôle décisif dans la résilience. Une approche holistique au-delà des opérations et de leur lot d’« early warnings » (alertes précoces) et de KPI (indicateurs clés de performance) consistera également à s’appuyer sur les acteurs clés de l’écosystème des entreprises : les clients, les fournisseurs et tout « stakeholder » (partie prenante) ayant un impact sur le compte de résultat (P&L(2)). Enfin, la capacité de l’équipe de direction à déterminer des options, des choix, des solutions multiples et des scénarios en amont permettra de réagir instantanément en activant tel ou tel levier en fonction du moment, du contexte et des effets qualitatifs et quantitatifs recherchés. Le financement concret de cette résilience devient alors parfois un défi, voire un casse-tête, pour les CEO/COO.
En ajoutant à cela les périodes d'inflation et de hausse des coûts – notamment ceux de la technologie –, minimiser des dépenses non essentielles, mais rarement analysées en détail, préserve la marge bénéficiaire de l'entreprise ainsi que sa compétitivité sur le marché, et favorise le financement de la résilience. Cela signifie souvent que les processus doivent être repensés, et certaines tâches automatisées. L’entreprise aura également intérêt à négocier des contrats plus avantageux avec les fournisseurs et à promouvoir une culture d'efficacité mesurable au sein de l'organisation.
La réduction des coûts indirects permet de libérer des ressources financières précieuses, qui peuvent être réinvesties dans des domaines stratégiques, favorisant ainsi une croissance durable et une meilleure résistance aux fluctuations économiques. Il s’agit ici d’un financement du stratégique par le non-stratégique.
Réduire les coûts indirects « intelligemment » se présente donc comme une direction pragmatique, non invasive, non consommatrice de temps inutile, consistant à rechercher les opportunités « cachées », non stratégiques, sans remettre en question la vision, la direction et les objectifs de l’entreprise, mais en optimisant et en redéployant les ressources. Le dirigeant et les équipes de direction doivent alors clairement sensibiliser l’ensemble de l’organisation sur l’enjeu de la réduction de tous les coûts indirects et la transformer en objectif essentiel de l'entreprise. L'adoption de l'intelligence artificielle – adaptée à façon – dans les processus opérationnels peut non seulement optimiser la productivité, mais engendrer également des changements culturels bénéfiques. En libérant les employés des tâches répétitives, elle leur permettra de se concentrer sur des activités à plus forte valeur ajoutée.
Les défis du marché du travail et l'impact financier
La guerre des talents s'intensifie, particulièrement en matière de compétences numériques et technologiques. Les jeunes professionnels, moteurs d'innovation et de croissance, sont attirés par des emplois qui offrent à la fois des avantages compétitifs et une culture d'entreprise alignée sur leurs valeurs et aspirations. Le défi pour les sociétés ne réside pas seulement dans l'attraction de ces talents, mais aussi dans leur rétention, face à une génération en quête de sens et d'équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.
En parallèle, comme nous l’avons souligné précédemment, l'augmentation des coûts de production, exacerbée par des facteurs conjoncturels tels que l'inflation, exerce une pression considérable sur les marges. Les entreprises doivent donc naviguer avec prudence pour maintenir leur rentabilité sans compromettre leur capacité à investir dans le capital humain et l'innovation.
(1) CEO : chief executive officer (directeur général) ; COO : chief operating officer (directeur de la stratégie opérationnelle).
(2) « Profit & loss » en anglais.
 
 
En résumé
Face à l’incertitude croissante, la résilience est devenue l'élément central de toute stratégie visant à maintenir la compétitivité et la rentabilité. Les entreprises ayant adopté une approche agile et flexible ont mieux résisté aux perturbations, tandis que les structures inflexibles ont souffert de manière significative. Un autre point clé tient à la réduction des coûts indirects. Diminuer ces dépenses non essentielles implique souvent une remise en question des pratiques existantes, l'automatisation de certaines tâches, des négociations plus avantageuses avec les fournisseurs ainsi que la promotion d'une culture d’efficacité. Et, en point d’orgue : l’excellence commerciale, opérationnelle et à tous niveaux, s’appuyant notamment sur la capacité des entreprises à attirer et retenir ses talents.