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Hydro Power Plant

Hydro Power Plant
Le petit fabricant qui n’a pas peur des grands
Hydro Power Plant est spécialisée dans la fabrication d’équipements électromécaniques pour les petites et moyennes centrales hydroélectriques. La société, qui exporte la moitié de sa production, est considérée comme leader en France sur son créneau – les petites et moyennes puissances – face à des géants tels que GE ou Andritz Hydro.
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Par Djamel Khamès
Publié le 2024-01-22
Réélue tous les ans depuis 2020 par Les Échos comme l’une des entreprises championnes de la croissance, labellisée « Solar Impulse Efficient Solution(1) », « La French Fab » et « Bpifrance Excellence », la société Hydro Power Plant (HPP) a également été sélectionnée parmi les 100 entreprises invitées à représenter le « Made in France » à l’Élysée, en juillet 2023… « J’ai pu y exposer une maquette de turbine et y faire la rencontre de notre président », témoigne Pierre Pisterman (Me. 200), directeur général du groupe HPP. HPP, qui a fabriqué et installé sa première turbine hydroélectrique en 1906, est l’héritière d’une culture d’hydroélectriciens qui fait encore la différence aujourd’hui. Pierre Pisterman a d’ailleurs accroché au mur de son bureau le plan de cette machine, inventée par Louis Tinchant, son arrière-grand-père, fondateur de l’entreprise qui deviendra HPP en 1972. « Pour la petite histoire, cette turbine fonctionne encore. On peut l’observer près de Vittel, dans les Vosges », souligne l’actuel directeur général.
DE LA CONCEPTION À LA FABRICATION
Quand fut créée la société HPP il y a cinquante ans, l’activité relevait essentiellement du bureau d’études, évidemment spécialisé dans les turbines hydroélectriques. La fameuse culture maison a fait la différence sur de nombreux contrats. Quand Pierre reprend les rênes de l’entreprise familiale en 2015, celle-ci comptait trois salariés. Aujourd’hui, ils sont 45 répartis entre le BE (15 salariés) et l’usine (30), le premier étant localisé à Vandœuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), et la seconde à Saint-Nabord (Vosges). L’usine, reprise en difficulté en 2019, ne tournait plus qu’avec 17 personnes, contre 40 auparavant(2). « Nous connaissons depuis 2015 une croissance régulière des revenus, de 18 % en moyenne par an », précise Pierre Pisterman. L’unité industrielle vosgienne, qui a gardé Hydreo pour nom, possède un bureau des méthodes permettant aujourd’hui à HPP d’internaliser la fabrication des turbines qu’elle sous-traitait autrefois. Dans l’atelier de 4 500 m2 (équipé d’engins de manutention pouvant lever plus de 100 t), on fabrique et assemble différents équipements, tous liés à une centrale hydroélectrique ou à une infrastructure fluviale 100 % française : batardeaux, dégrilleurs, clapets, portes d’écluse, vannes, etc., standards ou sur mesure, de 300 kg à 80 t, en acier ou en inox, et sans limite de hauteur ni de largeur. Ce sont autant d’éléments qui participent à la maîtrise complète de la chaîne de valeur des centrales hydroélectriques.
PETIT ET GRAND À LA FOIS
« HPP est un nain au milieu de géants tels que GE et Andritz Hydro, ou de très gros comme Voith Hydro… Nous arrivons cependant à tirer notre épingle du jeu en étant spécialisé dans les petites et moyennes turbines, de 10 kW à 15 MW, sur lesquelles les gros ont du mal à se positionner. Néanmoins, nous ne couvrons pas le marché des très petites turbines, que l’on peut acheter sur catalogue. Au final, nous tirons avantage de notre taille et de notre agilité, sans oublier que nos machines, qui tournent depuis des décennies, parlent aussi pour nous », ajoute Pierre Pisterman. Les clients de HPP ont des profils variés, depuis le propriétaire individuel du moulin jusqu’au grand donneur d’ordres, tels Engie, EDF ou TotalEnergies. Pierre Pisterman précise qu’il « ne parle pas la même langue avec les uns et les autres ». Ils sont également pour moitié étrangers, principalement européens, africains et, dans une moindre mesure, sud-américains. Malgré un taux d’équipement élevé en Europe, l’avenir des turbines hydroélectriques n’est pas menacé. « La moyenne d’âge des turbines en Europe est d’une cinquantaine d’années environ. Leur rénovation ouvre de belles perspectives, comme récemment en Belgique où HPP a réhabilité quatre turbines Francis sur deux sites, pour un total de plus de 16 MW. Le marché des pays en développement présente également des débouchés intéressants, sachant qu’environ 9 % de la population seulement a accès à l’énergie dans certaines de ces régions. C’est le cas en République démocratique du Congo, par exemple, où l’on peut exploiter potentiellement une puissance hydroélectrique égale à 100 000 MW, soit la puissance installée en France », affirme le dirigeant. Ce dernier ajoute que HPP propose aussi des services, notamment la maintenance, voire l’exploitation de centrales hydroélectriques pour tiers. Cette diversification permet d’entretenir les liens avec les clients sur de longues périodes et les rassure quant à la fiabilité des équipements.
DES CENTRALES 4.0
La chaîne numérique qui relie le bureau d’études vandopérien à l’usine vosgienne et ses machines-outils programmables à souhait fait l’objet d’investissements réguliers. « HPP produit souvent des machines singulières, adaptées à des configurations topographiques uniques. Le savoir-faire manuel est encore précieux, car le bras d’un robot peut difficilement remplacer un soudeur hautement qualifié dans certains cas », tient cependant à rappeler Pierre Pisterman. Pour lui, mieux vaut mettre l’accent sur les centrales hydroélectriques 4.0 : « Ce sont de petites usines surveillées et pilotées à distance grâce aux capteurs-actionneurs connectés. » L’Internet des objets est déjà une réalité dans cet univers si peu médiatisé. In fine, avec HPP, ce sont plus de 300 turbines produites, livrées et installées dans plus de 40 pays, pour un total de plus de 500 MW de puissance installée.
 
(1) Ce label distingue 1 000 entreprises dans le monde qui sont à la fois respectueuses de l’environnement et rentables.
(2) Les salariés qui le désiraient ont été aidés par HPP dans leur recherche d’emploi. Au total, une trentaine d’entre eux ont retrouvé un emploi.